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Le printemps : entre renaissances, semailles et merveilles

Le printemps : entre renaissances, semailles et merveilles

🌼 Tout-petits – Dès 10 ans – Dès 3 ans – Dès 6 ans

Le printemps est une saison attendue avec un élan tout particulier. Après les rigueurs de l’hiver, il apporte une renaissance de la nature et des semailles prometteuses pour l’année à venir – autant de merveilles que les familles peuvent partager avec les plus jeunes. Cette période de renouveau est riche en traditions et légendes, issues de cultures anciennes comme de fêtes plus récentes. Du feu de joie des Celtes célébrant le retour de la lumière aux cloches de Pâques semant des œufs en chocolat, le printemps offre un patrimoine immatériel foisonnant. Découvrons ces traditions ancestrales et contemporaines, et voyons comment elles peuvent nourrir la curiosité et l’émerveillement des enfants de 3 à 10 ans, dans un esprit à la fois chaleureux, pédagogique et poétique.

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Le printemps : entre renaissances, semailles et merveilles

Un article pour découvrir les traditions du printemps, entre rites celtiques, fêtes chrétiennes, contes régionaux et activités familiales.

Le printemps : entre renaissances, semailles et merveilles

1. Traditions printanières : entre rites anciens et fêtes nouvelles

Le printemps a de tout temps inspiré des rites de renouveau, de fertilité et de célébration de la lumière. Bien avant nos fêtes actuelles, de nombreuses cultures marquaient l’arrivée du printemps par des cérémonies dédiées à la terre et au ciel. Chez les anciens Celtes, par exemple, trois grandes fêtes rythmaient la fin de l’hiver et le début de la belle saison : Imbolc, l’Équinoxe de printemps (parfois appelé Ostara dans des traditions plus tardives), et Beltane. Chacune de ces célébrations incarnait à sa manière le réveil du monde naturel :

  • Imbolc se tenait autour du 1^er février, à mi-chemin entre le solstice d’hiver et l’équinoxe de printemps. Consacrée à la déesse Brigit, cette fête marquait les premiers signes du réveil de la terre, la purification et la fécondité qui préfigurent le printemps journals.openedition.org . Plus tard, les traditions chrétiennes ont fait coïncider ce moment avec la Chandeleur (2 février), fête de la lumière où l’on bénit les chandelles. Il est intéressant de noter que la Chandeleur a pris place dans le calendrier exactement à la même période, supplantant à la fois les antiques Lupercales romaines et la fête celtique d’Imbolc : désormais, le 2 février célèbre la purification de la Vierge Marie et la présentation de l’enfant Jésus, tout en restant une fête de la lumière dans l’esprit populaire journals.openedition.org . En France, la Chandeleur est devenue la fête des crêpes, coutume familiale bien connue, sans qu’on soupçonne toujours ses racines païennes.
  • L’équinoxe de printemps (aux alentours du 20 mars) symbolise l’équilibre entre le jour et la nuit. Dans de nombreuses cultures antiques, cette date marquait le renouveau de la vie. Par exemple, dans la Perse ancienne, le nouvel an (Nowruz) était fixé à l’équinoxe vernal, signe du recommencement du cycle annuel auteldesbrumes.com . Chez les peuples celtiques, bien qu’on ne connaisse pas de fête spécifique de l’équinoxe dans les textes anciens, le printemps était globalement fêté comme le retour de la saison claire. Plus tard, le christianisme a établi au 25 mars la fête de l’Annonciation (annonce faite à Marie qu’elle enfantera Jésus). Ce n’est pas un hasard si cette fête fut placée neuf mois avant Noël, c’est-à-dire autour de l’équinoxe de printemps dioceseparis.fr . Le 25 mars fut même longtemps considéré comme le début symbolique de l’année dans de nombreuses régions d’Europe – on y voyait le jour où « le ciel et la terre se rejoignent » par l’Incarnation, faisant écho au réveil de la nature.
  • Beltane, célébrée autour du 1er mai, était l’une des plus grandes fêtes celtiques marquant l’apogée du printemps et l’entrée dans la saison lumineuse. Le nom Beltane signifie « feu de Bel » (Bel étant sans doute un dieu de la lumière) – le feu rituel étant au cœur des réjouissances nationalgeographic.fr . Dans la nuit du 30 avril, on éteignait tous les feux dans les foyers pour allumer un grand bûcher communautaire purificateur. On faisait passer le bétail entre deux brasiers afin de le protéger des maladies à l’aube de la saison des pâturages nationalgeographic.fr . Toute la communauté veillait ensuite en dansant, chantant, jusqu’au lever du jour du 1er mai. Cette ancienne fête de la fertilité et de la vitalité du printemps a été si aimée qu’elle ne disparut jamais tout à fait : elle s’est transformée au fil des siècles, devenant nos célébrations du Premier Mai nationalgeographic.fr . De nos jours, le 1er mai est connu comme la fête du Travail et le jour où l’on s’offre du muguet, mais c’est aussi un lointain héritier des feux de Beltane célébrant la victoire de la belle saison sur l’hiver. D’ailleurs, dans certaines campagnes françaises, on allumait encore jusqu’au XXe siècle des feux de mai ou on dressait des arbres de mai décorés de rubans pour souhaiter prospérité et bonheur à la communauté, perpétuant sans le dire l’esprit de Beltane.

Parallèlement aux célébrations païennes, le christianisme a superposé ses propres fêtes sur le calendrier printanier, souvent en écho aux mêmes thèmes de renaissance et de fertilité :

  • L’Annonciation (25 mars), comme évoqué, rappelle la promesse d’une naissance à venir – une symbolique de vie nouvelle qui s’accorde bien avec les bourgeons naissants de fin mars. Autrefois, cette date proche du printemps marquait la fête de la Nouvelle Lumière : on considérait que c’était autour de l’équinoxe que la création du monde avait eu lieu, que la résurrection du Christ était survenue et qu’il fallait donc débuter l’année. Sans verser dans le symbolisme excessif, il reste que le printemps, dans la foi chrétienne, est aussi le temps de l’espérance renouvelée.
  • Pâques, mobile mais toujours en mars-avril, est évidemment la fête centrale du printemps chrétien. Elle célèbre la résurrection du Christ, c’est-à-dire la victoire de la vie sur la mort – un thème en profonde résonance avec la nature qui verdit après l’hiver. Il est d’ailleurs établi que la date de Pâques est fixée d’après un repère astronomique naturel : le dimanche qui suit la première pleine lune de printemps. Ainsi, Pâques est arrimé aux cycles du soleil et de la lune, comme l’étaient bien des fêtes antiques. Au-delà du rite religieux, de nombreuses coutumes populaires de Pâques trahissent leurs origines païennes liées au printemps. L’œuf de Pâques, par exemple, est un symbole universel de vie et de renaissance. On a retrouvé des traces de la coutume d’offrir des œufs décorés au printemps bien avant l’ère chrétienne : les Perses et les Égyptiens anciennes teignaient des œufs qu’ils échangeaient lors des fêtes du renouveau eglise.catholique.fr . En Gaule, les druides gaulois eux-mêmes auraient eu pour habitude de teindre des œufs en rouge en l’honneur du soleil printanier eglise.catholique.fr . L’Église, plus tard, a intégré ces symboles en leur donnant une lecture chrétienne (l’œuf scellé qui s’ouvre figure le tombeau du Christ ouvert au matin de Pâques). Au Moyen Âge, il était d’ailleurs interdit de consommer des œufs durant le Carême : on les conservait jusqu’à Pâques, date à laquelle on les distribuait aux enfants et aux pauvres, parfois bénis par le prêtre, comme signe de joie et de fécondité retrouvée persee.fr eglise.catholique.fr . Aujourd’hui encore, nos enfants partent à la chasse aux œufs dans le jardin le dimanche de Pâques, perpétuant sans le savoir un rituel multimillénaire de célébration du printemps.
  • Après Pâques, le temps pascal comprend d’autres traditions printanières, moins connues mais autrefois très vivaces. Les Rogations, par exemple, sont des fêtes religieuses chrétiennes qui ont lieu fin avril ou en mai, lors des trois jours précédant l’Ascension. Instituées dès le Ve siècle en Gaule, les Rogations consistaient en des processions champêtres pour bénir les semailles et les bourgeons naissants, et pour implorer la protection divine sur les récoltes à venir. Dans la France rurale d’antan, il n’était pas rare de voir, à l’aube des Rogations, le curé et les villageois parcourir les champs en cortège, chantant des litanies, la croix en tête, afin de bénir les jeunes pousses de blé dans les sillons jstor.org . Ces processions mélangeaient dévotion et attachement au cycle agricole : on priait pour la pluie bienfaisante, on faisait des haltes aux croix des chemins, et l’on perpétuait sans doute l’écho d’antiques cérémonies païennes de protection des champs. Même si aujourd’hui ces processions se font rares, l’idée d’associer la spiritualité à la nature renaissante demeure, par exemple dans les bénédictions d’arbres ou de jardins communautaires au printemps dans certaines régions.

En somme, qu’il s’agisse des feux gaéliques sur la colline ou des cloches de Pâques au clocher, toutes ces traditions convergent vers une même idée : fêter le retour de la vie. Elles illustrent comment les hommes, depuis la nuit des temps, ont cherché à apprivoiser le mystère du printemps par des récits, des rites et des fêtes. Cette transmission se poursuit aujourd’hui dans nos familles, souvent de façon ludique et culturelle plus que religieuse : on allume encore des feux de joie à Pâques ou à la Saint-Jean, on cache des œufs dans le jardin, on offre du muguet porte-bonheur. Connaître l’origine de ces gestes, c’est redonner du sens à ce que l’on transmet à nos enfants, et les inscrire dans une histoire plus vaste que la seule observation du calendrier.

2. La nature en éveil : une leçon de vie pour les enfants

Si le printemps est si riche en symboles de renaissance, c’est avant tout parce que la nature elle-même raconte une histoire à cette saison – une histoire que les enfants peuvent observer chaque jour avec émerveillement. Pour les plus jeunes, le monde se transforme presque comme par magie : le jardin qui semblait endormi se couvre de pousses vert tendre, les arbres nus se parent de bourgeons puis de fleurs, les oiseaux reviennent chanter à l’aube, et de petits êtres fourmillants sortent de leurs cachettes. Cette effervescence printanière est une occasion rêvée d’éveiller chez l’enfant l’amour du vivant et la curiosité scientifique tout à la fois.

L’observation est la première clé d’une éducation vivante en cette saison. On peut encourager les enfants à jouer aux petits explorateurs de printemps : voici une coccinelle qui reprend du service sur un rosier, là une abeille qui butine le pissenlit tout neuf, ici une grenouille qu’on entend coasser après la pluie. Chaque rencontre est l’opportunité d’apprendre en s’émerveillant. Pourquoi la coccinelle a-t-elle des points noirs ? Comment l’abeille transporte-t-elle le pollen ? Où la grenouille était-elle cachée durant l’hiver ? – Autant de questions qui peuvent germer dans la tête des petits. En répondant ou en cherchant ensemble dans un livre illustré, les parents nourrissent la curiosité naturelle de l’enfant. Et il n’est pas nécessaire d’être un expert : la simple démarche d’observer, de décrire ce qu’on voit, puis éventuellement de dessiner ou de noter les découvertes dans un « carnet du printemps » peut marquer profondément l’âme d’un enfant. C’est un apprentissage concret et sensoriel, loin des écrans, qui lui fait sentir qu’il fait partie de la grande ronde du vivant.

Le printemps est aussi la saison idéale pour initier les plus jeunes à la jardinage et aux cycles de croissance des plantes. Planter quelques graines avec papa-maman (que ce soit dans le potager, sur le balcon ou même dans un simple pot sur le rebord de la fenêtre) est une activité à la fois ludique et instructive. L’enfant pourra chaque jour suivre le progrès de « son » semis – guetter l’apparition de la première radicelle, puis de la tige qui perce la terre, admirer la première feuille verte qui s’ouvre. Quelle fierté lorsqu’il pourra arroser lui-même sa petite pousse et, quelques semaines plus tard, peut-être récolter un radis croquant ou quelques brins de ciboulette qu’il aura fait pousser ! À travers ce geste simple, l’enfant fait l’expérience de la patience et de la responsabilité : il comprend que la nature a son rythme, que son soin attentif (un peu d’eau, de la lumière, de la protection contre le froid nocturne) est récompensé par la vie qui se développe. C’est là une merveilleuse leçon de pédagogie naturelle, où l’on apprend autant de ses réussites que de ses erreurs (il arrive que la graine germe mal ou que la jeune plante souffre d’un oubli d’arrosage – l’enfant apprend alors à ajuster ses gestes, doucement guidé par l’adulte).

Au-delà du jardinage, le printemps offre mille occasions d’interactions bienveillantes avec le vivant. On peut montrer aux enfants comment fabriquer une petite mangeoire pour les oiseaux du quartier, ou un abri à insectes pour les auxiliaires du jardin (comme les coccinelles ou les abeilles solitaires). Ces activités manuelles leur enseignent le soin du vivant : en construisant un nichoir et en surveillant discrètement s’il accueille une famille de mésanges, l’enfant développe de l’empathie pour des créatures fragiles et comprend l’importance de préserver leur habitat. On peut également partir en promenade en forêt ou au parc pour cueillir quelques trésors de printemps (dans le respect de la flore bien sûr) : quelques fleurs des champs pour apprendre leurs noms (primevère, violette, pâquerette…), des feuilles aux formes variées, des cailloux brillants. De retour à la maison, on pourra coller ces trouvailles dans un cahier nature, ou composer un petit herbier. Chaque feuille, chaque pétale peut être l’occasion d’une histoire : « Sais-tu que telle fleur était autrefois appelée ‘fleur de Pâques’ parce qu’elle éclot à cette période ? » ou « Regarde la forme de cette graine d’érable, on dirait une hélice d’avion – on l’appelle ‘samare’ et quand elle tombe elle tourne en volant ! ». Le parent partage ainsi son savoir avec l’enfant de manière vivante, en s’adaptant à son niveau de compréhension, sans jamais l’infantiliser mais en s’émerveillant avec lui.

En vivant le printemps de cette façon active et sensible, on jette peut-être les bases d’un lien fort entre l’enfant et la nature. Ce lien est essentiel pour qu’il grandisse en respectant le monde qui l’entoure. Les cycles des saisons deviennent alors pour lui non plus de vagues notions, mais des réalités concrètes et belles : « Au printemps, je me souviens, j’ai vu le cerisier du jardin se couvrir de fleurs blanches comme de la neige, j’ai entendu la première hirondelle, j’ai senti l’odeur de la terre mouillée après l’averse… ». Ces impressions, ces émotions constituent une éducation sensorielle et poétique qui complète à merveille les apprentissages plus formels.

3. Histoires de printemps : fables et contes à partager

Le printemps n’est pas seulement dans les champs et les jardins : on le retrouve aussi dans la littérature enfantine et les contes populaires, qui regorgent de références à cette saison du renouveau. Raconter une histoire du printemps à son enfant, c’est prolonger le plaisir de la découverte naturelle par celui de l’imaginaire. La tradition orale et écrite française offre plusieurs fables et contes adaptés aux 3-10 ans, où les animaux et la nature printanière tiennent souvent le premier rôle.

Les fables de La Fontaine en sont un bel exemple. Jean de La Fontaine, avec son style inimitable alliant pédagogie et malice, a souvent mis en scène des animaux dans un décor champêtre évoquant le printemps ou l’été. Qui ne connaît pas la fable du Lièvre et de la Tortue ? Dès l’école primaire, les enfants aiment ce récit d’une course insolite entre la rapide créature et la patiente tortue. Le décor n’est pas décrit en détail par La Fontaine, mais on imagine sans peine un chemin bordé d’herbages fleuris où gambade notre lièvre trop sûr de lui. La morale, elle, est explicite dès le début – ce qui en fait un excellent enseignement pour les jeunes esprits : «** Rien ne sert de courir ; il faut partir à point** » essentiels.bnf.fr . Ces quelques mots simples essentiels.bnf.fr , que l’on peut expliquer à l’enfant (il vaut mieux y aller posément et avec régularité que de foncer sans réflexion), résonnent avec ce que la nature nous apprend au printemps : chaque chose vient en son temps, la graine pousse à son rythme… En racontant Le Lièvre et la Tortue, les parents peuvent insister sur les descriptions implicites – « Vois-tu le lièvre qui folâtre et fait des détours pour profiter du beau temps pendant que la tortue avance doucement dans l’herbe ? » – et inviter l’enfant à commenter l’histoire : « Et toi, préfères-tu être rapide comme le lièvre ou persévérant comme la tortue ? ». La fable devient alors un support de discussion et de réflexion, au-delà du plaisir de la narration. D’autres fables de La Fontaine, comme Le Chêne et le Roseau (avec la tempête qui plie le frêle roseau tandis que le grand arbre orgueilleux se brise) ou La Cigale et la Fourmi (qui évoque en creux l’issue de l’été et l’anticipation de l’hiver), peuvent également être rattachées aux cycles de la nature et aux leçons qu’on en tire – même si leur morale est plus sociale, elles s’appuient sur des scènes de la vie des champs qui parleront aux enfants.

En dehors des fables, on trouve dans le folklore régional français des contes pastoraux et animaliers empreints de l’atmosphère du printemps. Pensons par exemple à La Chèvre de Monsieur Seguin, ce conte tiré des Lettres de mon moulin d’Alphonse Daudet, qui bien qu’ayant une fin tragique, demeure un récit magnifique pour évoquer la beauté de la montagne provençale et l’aspiration à la liberté. On peut choisir de ne raconter qu’en partie cette histoire aux plus petits, ou d’édulcorer la fin selon l’âge, mais la description de la chevrette Blanquette découvrant la montagne pour la première fois est un morceau d’anthologie que l’on peut lire à voix haute, tant il peint un tableau printanier féerique. « Quand la chèvre blanche arriva dans la montagne, ce fut un ravissement général. Jamais les vieux sapins n’avaient rien vu d’aussi joli. On la reçut comme une petite reine. Les châtaigniers se baissaient jusqu’à terre pour la caresser du bout de leurs branches. Les genêts d’or s’ouvraient sur son passage, et sentaient bon tant qu’ils pouvaient. Toute la montagne lui fit fête.» fr.wikisource.org . N’est-ce pas là une manière poétique de dire que la nature accueille avec joie un nouvel être libre en son sein ? Les enfants seront sensibles à ces images : les arbres qui se penchent pour saluer la petite chèvre, les fleurs qui embaument sur son chemin… On peut leur demander d’imaginer qu’ils sont, eux aussi, accueillis par la montagne de la même façon, ou même mimer avec eux la scène (les grands châtaigniers qui font une révérence, les fleurs qui ouvrent leurs pétales comme on ouvre grand les bras). Ce conte du Midi de la France permet de parler du désir d’aventure qu’on peut avoir quand on grandit, de la nécessité de prudence aussi (le loup rôde, hélas, dans la montagne), et surtout de peindre un décor provençal authentique – cigales, genêts, bruyères – qui change un peu des paysages habituels. C’est une façon de voyager en famille par l’imaginaire.

D’autres contes traditionnels peuvent être évoqués selon les régions et les envies. En Picardie ou en Alsace, on racontera peut-être la légende du « Lièvre de Pâques », ce fameux lapin magique qui apporte les œufs aux enfants le matin de Pâques eglise.catholique.fr . Saviez-vous qu’en Alsace et en Allemagne, bien avant que les cloches de Rome ne déposent des chocolats dans nos jardins, on parlait d’un lièvre (ou d’un lapin blanc) qui cachait les œufs dans les buissons pour les enfants sages eglise.catholique.fr ? Cette croyance remonte au moins au XV^e siècle et perdure encore : de nos jours, de nombreux tout-petits croient dur comme fer que c’est le « lapin de Pâques » qui a pondu les œufs en chocolat ! On peut en faire un conte plein de malice : « Il était une fois un petit lièvre très espiègle qui, une nuit de printemps, se faufila dans le jardin pour y cacher des œufs multicolores… ». Les yeux des enfants pétillent rien qu’à cette idée. Dans le Nord de la France, la tradition populaire évoque parfois une cloche volante (revenue de Rome) ou même un renard de Pâques dans certaines contrées – autant de variantes régionales qui nourrissent l’imaginaire printanier des enfants et les relient à un patrimoine immémorial.

Enfin, ne négligeons pas les chansons et poésies qui célèbrent le printemps, et qui sont de charmants compléments aux histoires. Des comptines comme « Gentil coquelicot » ou « Le Grand Cerf » évoquent la nature et les animaux. Des poèmes courts, appris à l’école, comme « Printemps » de Victor Hugo (Oh ! regardez, regardez donc, l’hiver s’en va… ) ou « Le retour du printemps » de Théophile Gautier, peuvent être lus ou récités en famille, simplement pour le plaisir des sonorités et des images. Ces textes offrent une dimension poétique au vécu du printemps, invitant l’enfant à ressentir intérieurement la joie de la saison nouvelle.

L’important, dans ce partage de contes et fables, est de conserver un ton vivant et chaleureux. Le but n’est pas de faire la classe ou de surcharger l’enfant d’informations, mais bien de titiller son imagination, de le faire rire (les frasques du lièvre vaniteux ou les cocasseries du lapin de Pâques), de l’émouvoir (la vaillance de la chèvre de M. Seguin face au loup). Ainsi, les histoires font le lien entre la réalité observée (les fleurs, les bêtes, la météo changeante) et le monde des symboles et des morales. C’est un enseignement doux, qui passe par l’émotion et le rêve.

En famille : célébrer le printemps aujourd’hui

Après avoir exploré les traditions, mis les mains dans la terre et la tête dans les histoires, vient le moment de vivre pleinement le printemps en famille. Pourquoi ne pas s’inspirer des anciennes fêtes pour créer de joyeux rituels familiaux ? Inutile de raviver les feux druidiques ou d’organiser une procession solennelle dans les champs – de simples activités ludiques et conviviales peuvent suffire à donner un sens à la saison et à créer des souvenirs durables pour les enfants. Voici quelques idées, directement inspirées des coutumes évoquées, à adapter selon l’âge de chacun :

  • Planter quelque chose ensemble – Que ce soit un potager miniature, un arbre dans le jardin, ou même des lentilles sur du coton pour les plus petits, la plantation est un geste emblématique du printemps. On peut le ritualiser en choisissant, par exemple, la date du 21 mars (début du printemps) ou du lundi de Pâques pour « mettre en terre » les graines ou le jeune plant. Chaque enfant peut décorer un petit pot à son nom, y semer une graine (haricot magique qui pousse vite, graines de fleurs mellifères, etc.), et s’en occuper dans les semaines suivantes. Le jour de la plantation, expliquez aux enfants que dans l’Antiquité on célébrait ainsi la déesse de la terre fertile, et qu’aujourd’hui encore ce petit geste aide la nature et donne la vie. C’est une activité à la fois symbolique et concrète, qui reconnecte toute la famille avec le cycle des semailles.

  • Fabriquer des couronnes végétales ou des bouquets éphémères – Rappelez-vous les fêtes où l’on couronnait la « Reine de Mai » de fleurs : pourquoi ne pas improviser un atelier couronnes de printemps ? Lors d’une balade, cueillez quelques pâquerettes, primevères, boutons d’or (en veillant à ne prendre que là où c’est permis et en petite quantité). À la maison, aidez les enfants à tresser ces fleurs dans des brindilles flexibles ou à les fixer sur un anneau de carton avec du raphia. Chaque enfant peut ainsi coiffer sa création colorée. Organisez ensuite un petit défilé fleuri dans le jardin ou le salon, en dansant au son d’une musique gaie ! Cette activité manuelle stimule la créativité et fait ressentir aux petits qu’eux aussi participent à la célébration de la nature en beauté. Variante si vous avez un jardin : décorer un arbuste avec des rubans et des fleurs en papier pour en faire un « arbre de printemps » tel un arbre de mai, symbole de croissance joyeuse.

  • Observer les étoiles un soir doux – Au printemps, les nuits commencent à se radoucir et le ciel offre de belles constellations. Emmitouflez toute la famille dans des plaids un soir clair d’avril, étendez-vous dans le jardin ou regardez par la fenêtre, et repérez ensemble quelques étoiles. Racontez l’histoire de l’Étoile du Berger (la planète Vénus, éclatante au crépuscule) que mentionnent tant de contes pastoraux, ou cherchez la Grande Ourse qui pointe vers l’étoile Polaire. Vous pouvez lier cette observation à la saison : « Vois-tu, autrefois les bergers de Provence guidaient leurs troupeaux au printemps en suivant l’étoile du matin… » ou « Les constellations changent avec les saisons, bientôt celles d’été arriveront… ». C’est une activité calme qui émerveille toujours les enfants – et les parents –, parfaite pour conclure en douceur une journée de plein air.

  • Cuisiner en lien avec les traditions – La cuisine est un formidable vecteur de transmission culturelle. Pour marquer le printemps, préparez en famille une recette traditionnelle de cette saison. Par exemple, faites sauter des crêpes à la Chandeleur en rappelant qu’on les faisait autrefois en symbole de soleil (leur forme ronde et dorée y fait penser) pour attirer les bonnes récoltes journals.openedition.org . Ou bien, à Pâques, réalisez avec les enfants un nid de Pâques (gâteau en forme de nid garni d’œufs en sucre) ou tout simplement décorez des œufs durs avec des teintures naturelles et de la peinture, comme le faisaient nos ancêtres il y a fort longtemps eglise.catholique.fr . En Provence, on pourra essayer la recette de la pogne ou de la fougasse de Pâques, brioches parfumées à la fleur d’oranger que l’on partageait à la fin du carême. En faisant participer les plus jeunes aux mélanges et pétrissages (selon leur capacité), on leur raconte l’origine de ces mets : « Saviez-vous qu’au temps de vos arrière-arrière-grands-parents, on offrait des œufs rouges pour fêter le printemps ? Aujourd’hui on les mange en chocolat, mais on peut aussi peindre de vrais œufs comme des artistes ! ». La joie de déguster ensuite le fruit de ce travail collectif n’en sera que plus grande.

  • Inventer votre propre fête du printemps – Pourquoi ne pas créer une petite tradition familiale qui reviendra chaque année au printemps ? Ce peut être tout simple : le pique-nique de la première belle journée, qu’on organise spontanément dès que mars ou avril offre un après-midi ensoleillé, même sur la pelouse du jardin ou le carré de pelouse du parc voisin – l’important est de manger dehors, de sentir le soleil, comme une fête improvisée du retour des beaux jours. Ou bien le carnaval du printemps : se déguiser avec des couronnes de feuillage, des peintures vertes sur les joues, pour jouer à être des esprits de la forêt qui chassent l’hiver en riant. Les enfants peuvent confectionner un épouvantail d’hiver avec de vieux vêtements et journaux, le décorer puis le « chasser » du jardin symboliquement (certains villages faisaient brûler Monsieur Hiver en effigie à la fin du carnaval). Laissez libre cours à votre imagination familiale : ce rituel n’appartient qu’à vous, mais il donnera aux enfants un repère joyeux qu’ils attendront chaque année.

En conclusion, le printemps est une saison d’abondance – abondance de vie, de couleurs, d’histoires et de traditions. En le présentant aux enfants comme un terrain d’exploration et de célébration, on nourrit chez eux un sentiment à la fois d’ancrage (ils s’inscrivent dans le fil des générations qui ont fêté le printemps) et d’émerveillement toujours renouvelé. Renaissances, semailles, merveilles : trois mots-clés pour guider nos pas de parents tout au long de cette belle saison. Que chaque bourgeon observé devienne une leçon de patience, que chaque ancienne coutume partagée se mue en moment de complicité familiale, que chaque activité créative rapproche petits et grands – voilà le vœu que l’on peut former. Le printemps revient chaque année nous rappeler que la vie est un cycle fait pour être chéri et transmis. Profitons-en avec nos enfants, dans la douceur pastel et la chaleur simple d’un enseignement vivant, pour faire fleurir en eux la joie et la curiosité qui ne faneront jamais.

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Sources

Les informations historiques et ethnographiques proviennent d’articles de référence et d’ouvrages spécialisés, notamment Jean-Claude Schmitt (EHESS) sur la christianisation des rites saisonniers journals.openedition.org , un article de National Geographic sur les célébrations celtiques de Beltane nationalgeographic.fr nationalgeographic.fr , ainsi que des ressources de la Bibliothèque nationale de France et de Persée. Les citations littéraires sont issues des Fables de La Fontaine essentiels.bnf.fr et du conte La Chèvre de M. Seguin d’Alphonse Daudet fr.wikisource.org . Des documents de l’Église catholique ont également éclairé les traditions pascales (œufs, lapin de Pâques) et leur origine préchrétienne eglise.catholique.fr eglise.catholique.fr . Enfin, des chroniques historiques rappellent la persistance des rogations dans les campagnes françaises jusqu’à l’époque moderne jstor.org . Toutes ces sources convergent pour montrer combien le printemps, entre rites anciens et pratiques d’aujourd’hui, reste une saison merveilleuse à vivre en famille. journals.openedition.org nationalgeographic.fr eglise.catholique.fr fr.wikisource.org

🧭 Pour aller plus loin

📎Les origines de Pâques : une fête très ancienne📎L’été : entre soleil, moissons et merveilles
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